Translating Constraints
Journées d’étude
Traduire, la contrainte / Translating constraints
15-16 novembre 2018, Institute of Modern Languages Research, Londres
Argumentaire
Le programme de recherche « Littérature sous contraintes/ Literature under constraint » (L.U.C.) se donne pour objet d’étude l’espace littéraire français des quarante dernières années, qu’il lit à la lumière de la notion de « contrainte ». S’il est un domaine de l’activité littéraire où cette notion prend tout son sens, c’est sans conteste celui de la traduction, « témoignage très éminent » de la « vie des œuvres » selon Walter Benjamin (1971 [1917] : 268). En raison de la prolifération des textes et des données à transférer dans une ou plusieurs autre.s langue.s, au XXIe siècle, la traduction fait désormais partie de notre lot quotidien (Bassnett 2014). En parallèle, depuis une vingtaine d’années, la discipline dédiée à l’étude des processus de traduction, les « Translation Studies », a connu un véritable essor. Le troisième temps fort du projet L.U.C., centré sur les enjeux posés par la traduction dans le cadre de la littérature contemporaine d’expression française, contribuera à ce foisonnant domaine de recherche en démontrant que la traduction est une activité soumise à nombre de contraintes, à la fois inhérentes à la pratique même de traduire (Bellos 2012 [2011] ; Henitiuk 2012), et relatives aux conditions générales des échanges culturels internationaux (Heilbron et Sapiro 2007, 2008).
En premier lieu, on peut mentionner la position d’invisibilité dans laquelle est placée le traducteur (Venuti 1995) ; d’une part, en vertu du manque de reconnaissance de son activité, et d’autre part, du fait de devoir faire fondre le texte traduit dans les normes de la langue du pays récepteur – pratique que Venuti, en reprenant le lexique de Schleiermacher (1992 [1813]), a qualifié de « domestication » (1995, 1998, 2000, 2013). En effet, ce « petit art », pour reprendre le titre de l’ouvrage de Briggs (2017), malgré les efforts des théoriciens et praticiens pour le valoriser comme une pratique de créative (Scott 2000, 2002 ; Polizzotti 2018), souffre d’un manque de reconnaissance artistique. Ensuite, la « tâche du traducteur », pour employer l’expression de Benjamin, exige à coup sûr un certain type de dispositions pour se mesurer, et peut-être surmonter, des contraintes qui varieront du tout au tout selon qu’on se placera au plan de la « littérature d’image » ou à celui de la « littérature d’idées » - pour reprendre et détourner la célèbre distinction de Balzac (Diaz 2008).
Au mois de novembre, deux demi-journées seront consacrées à l’étude de la traduction au prisme de la contrainte dans le cadre du projet L.U.C. Dans un premier temps, le jeudi 15 novembre, la question de la circulation internationale de la littérature d’expression française amènera à traiter celle du bilinguisme, considérée ici sous deux angles : celui du bilinguisme de certains auteurs, dont la figure la plus emblématique est celle de Samuel Beckett (Jean-Michel Gouvard), et celui de certains champs littéraires, où le français est à la fois héritage historique, legs colonial et vecteur de diffusion mondiale (Bassnett et Trivedi 1997). Dans ce cadre, seront abordé les cas des champs littéraires canadien et algérien (Pauline Henry-Thierney, Tristan Leperlier).
Dans un second temps, le vendredi 16 novembre, il s’agira d’analyser les structures des échanges culturels internationaux, les instances et les agents d’intermédiation dans la circulation du livre français à l’étranger (Marcella Frisani). Mais également de se pencher sur les difficultés spécifiques au métier de traducteur (Christopher Clarke), et de formuler une théorie générale de la traduction comme forme d’écriture sous contrainte (Dominic Glynn)
Organisé avec le soutien de l’Arts and Humanities Research Council (AHRC)